Un psychologue méditant explore ces deux mondes de l'esprit

A l’heure où la méditation touche le grand public et n’est plus réservée à une élite engagée sur une voie spirituelle orientale mais s’inscrit dans le champ de la santé mentale, la nouvelle génération de psychologues se trouve à la croisée des mondes. La pratique de la simple présence rencontre le soin psychique. La méditation alliée à la psychologie ouvrirait-elle un nouvel espace thérapeutique, une nouvelle entente de l’être humain plus profonde, plus juste, plus directe ?
Ce blog en est la recherche vivante.

samedi 4 avril 2020

Dignité humaine, tendresse et courage

Chögyam Trungpa, le Dorjé Dradül de Mukpo

La dignité humaine ne dépend pas du compte en banque. Elle provient de ce que nous puisons dans nos ressources humaines inhérentes, en faisant les choses avec nos propres mains, ici et maintenant, correctement, magnifiquement. Nous pouvons réellement le faire ; même dans la pire des situations, nous avons le pouvoir d’infuser de l’élégance dans notre vie.

Le chaos du monde est dû en grande partie au fait que les gens ne savent pas s’apprécier. N’étant jamais parvenus à éprouver de la sympathie ou à manifester de la douceur envers eux-mêmes, ils ne peuvent faire l’expérience de l’harmonie ou de la paix intérieure ; par conséquent, ce qu’ils communiquent aux autres est également discordant et confus.

On devrait toujours se respecter soi-même et être à l’aise. Quand on marche dans la rue, inutile de se précipiter. On peut simplement se balader. Être soi-même, s’apprécier soi-même. On peut même apprécier son bavardage mental. Être sensible à sa condition d’être humain d’une seule pièce.

Quand nous éveillons notre cœur, nous découvrons avec surprise qu’il est vide. (…) Si nous cherchons le cœur éveillé, si nous creusons dans notre poitrine pour le trouver, nous n’y découvrirons rien d’autre qu’une sensation de tendresse.
 
La première fois qu’un être humain donne naissance au cœur sensible qui est le propre du guerrier, il peut se sentir extrêmement gauche et ne pas trop savoir comment s’y prendre avec ce type de courage. Mais par la suite, à mesure qu’on se familiarise avec cette tristesse, on s’aperçoit que l’être humain est fait pour être tendre et ouvert.

La tendresse est faite aussi de tristesse ; il ne s’agit pas de la tristesse de celui qui s’apitoie sur son sort ou qui vit une carence affective, mais d’une situation naturelle de plénitude. On se sent à ce point plein et riche qu’on est sur le point de fondre en larmes.

Habituellement, être courageux veut dire ne pas avoir peur, ou alors retourner les coups que l’on reçoit. Mais ici nous ne parlons pas du courage des bagarres de ruelle. Le véritable courage est le produit de la tendresse. Il survient lorsque nous laissons le monde effleurer notre cœur, notre cœur si beau et si nu. Nous sommes disposés à nous ouvrir, sans résistance ni timidité, et à faire face au monde. Nous sommes disposés à partager notre cœur avec les autres.


Extraits de  Chögyam Trungpa, Shambhala. La voie sacrée du guerrier, Seuil, 1990. 

En souvenir du Dorjé Dradül de Mukpo mort à 47 ans le 4 avril 1987. 
Bon courage à tous dans ces temps difficiles !